Numérique Responsable : De la Prise de Conscience au Passage à l'Action
Un écosystème structuré autour du numérique responsable
Le numérique est souvent perçu comme un secteur énergivore, mais il représente aussi une formidable opportunité pour repenser nos usages. Numeum, principal syndicat professionnel du numérique en France, regroupe près de 2500 entreprises et couvre 85 % du marché du numérique dans le pays. À travers différentes commissions thématiques, l'organisation accompagne ses adhérents sur les enjeux fiscaux, sociaux et environnementaux.
Parmi elles, la Commission Numérique et Environnement joue un rôle clé dans la mise en œuvre du numérique responsable. Comme l’explique Gilles Mezari :
"Le numérique responsable se décline en trois piliers : l’inclusion (accès au numérique pour tous), la compliance (réglementations, cybersécurité, souveraineté) et l’environnement. Trop souvent, on résume le sujet au carbone, mais englobe aussi des dimensions sociales, sociétales et réglementaires.
Du recyclage au réemploi : la mutation en cours
Longtemps centré sur le recyclage, le secteur du numérique s’oriente désormais vers une logique de réemploi et d’optimisation des ressources. Un changement de paradigme essentiel pour répondre aux nouvelles exigences réglementaires et aux attentes des consommateurs.
"Aujourd’hui, plutôt que de parler de recyclage, les organisations pensent d’abord au réemploi. Prolonger la durée de vie des équipements, réparer plutôt que remplacer, devient le vrai enjeu. Mais le marché peine encore à répondre aux besoins des grandes entreprises et des collectivités, qui doivent atteindre un certain pourcentage de matériel reconditionné."
Malgré une prise de conscience collective, le passage à l’acte reste complexe. Selon Gilles Mezari, les demandes institutionnelles dépassent souvent les capacités du marché, ce qui crée un décalage entre l’offre et la demande en équipements reconditionnés.
Les nouvelles contraintes réglementaires : un levier d’accélération ?
Les entreprises sont aujourd’hui confrontées à une nouvelle réalité : l’entrée en vigueur de la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive). Cette réglementation européenne impose aux grandes entreprises de publier un bilan extra-financier, englobant des indicateurs environnementaux et sociaux.
"Beaucoup de PME pensent qu’elles ne sont pas concernées. Mais en réalité, dès qu’un grand groupe est soumis à la CSRD, il doit inclure dans son bilan l’impact de toute sa chaîne de valeur. Résultat : ses prestataires et sous-traitants doivent eux aussi se conformer à ces obligations."
Face à ces nouvelles exigences, de nombreuses entreprises cherchent à structurer leur démarche RSE. Selon Gilles Mezari, la labellisation peut être une solution efficace pour cadrer et valoriser les actions mises en place :
"Une labellisation n’est pas une fin en soi, mais un levier de progression. Que ce soit B Corp, EcoVadis ou la norme ISO 26000, ces labels permettent d’identifier des axes d’amélioration et de donner une visibilité à son engagement."
Une jeunesse plus engagée et une vision optimiste
Malgré les défis, Gilles Mezari reste convaincu que la nouvelle génération saura accélérer le changement :
"Les jeunes générations ne sont pas idiotes. Elles sont résilientes et s’adaptent rapidement aux nouveaux enjeux. Bien sûr, nous avons tous une dualité entre notre rôle de citoyen (soucieux de l’environnement) et notre rôle de consommateur (attiré par la nouveauté et l’instantanéité). Mais la sensibilisation progresse, et j’ai confiance en l’avenir."
Le numérique responsable est en pleine mutation. Entre nouvelles réglementations, innovations et changement des mentalités, l’ensemble de l’écosystème est en train de structurer une approche plus durable. Reste à transformer cette prise de conscience en véritable levier de performance.
Conclusion
La transition vers un numérique responsable ne se fera pas du jour au lendemain, mais elle est déjà en marche. Si la prise de conscience est bien là, le véritable enjeu est désormais d’adapter les modèles économiques et d’aligner l’ensemble des acteurs sur une trajectoire plus durable.
Les entreprises ont un rôle clé à jouer dans cette transformation, en intégrant les enjeux RSE au cœur de leur stratégie. Un défi, certes, mais aussi une opportunité de différenciation et de compétitivité dans un monde où l’éthique et la transparence deviennent des critères incontournables.
Article rédigé en novembre 2024 à partir d’un échange avec Gilles Mezari, président de la Commission Numérique et Environnement de Numeum.